BONAPARTE  de Patrice Gueniffey

Gallimard, 2013

Introduction:

12 pages.

Première partie (94 pages), 5 chapitres.

Napoléon et la Corse

1793.

L'enfant qui naît en 1769 a pour père Carlo, francisé plus tard en Charles, et Letizia. Ils sont génois et en parlent le dialecte. Le père court après la fortune, les honneurs et Paoli. La famille Buonaparte n'est pas toujours appréciée par ses compatriotes. Elle bénéficie d'appuis familiaux étendus. Les troupes royales françaises occupent de longues années le terrain, en appui de la République de Gênes. "La Corse des présides, en tout cas celle d'Ajaccio, n'était pas une anti-Corse mais une autre Corse: différente..."

"Avec l'enclavement géographique, la pauvreté, l'ignorance et l'absence d'élites cultivées, les structures familiales figuraient au premier rang..."

Napoléon sera entouré d'une nuée de tantes, cousins, qui l'aideront à grandir ainsi que sa nourrice qu'il appelait Maman. A l'âge de 9 ans il est conduit sur le continent pour y apprendre le français et être éduqué dans les écoles militaires qui n'en avaient que le nom, ces collèges enseignaient les lettres classiques, les mathématiques...

Il se rappellera ce jour où il embarqua: sa mère était dans une première voiture avec le Comte de Marbeuf, quand son père, Joseph, le frère aîné et lui-même, suivaient dans un autre équipage. Plus tard il se posera des questions sur sa possible bâtardise...

Il restera de longues années sans revoir l'île puis utilisera de longues permissions pour y séjourner et démêler les affaires familiales à la mort de son père. Il essaiera de s'allier Paoli, mais celui-ci s'en méfiait.

Deuxième partie (64 pages), 3 chapitres.

Entrée en scène

1793-1796.

Au siège de Toulon, Buonaparte fait preuve de clairvoyance en bombardant la rade qui protégeait la ville. Une fois les Anglais chassés, il n'a pas de mal à s'en rendre maître. Le voilà convaincu de ses talents de stratège. A Paris, c'est la fin pour Robespierre. Napoléon l'admirait. Il comprenait la Terreur. Elle découlait de la Révolution qu'il faudrait un jour savoir stopper. Lui seul le ferait. Magnanime avec les Jacobins qu'il employa à son service il détestait les Constituants, qu'il jugeait responsables de la Révolution. Après la chute de Robespierre Buonaparte fut arrêté et incarcéré au fort Carré d'Antibes, ou peut-être assigné à résidence chez son logeur. Il rédigea un long mémoire pour justifier ses actions et lut "L'histoire des Campagnes" du Maréchal de Maillebois, qu'il assimila avec bonheur. Rapatrié sur la capitale, il participa à titre officieux aux travaux du bureau de la guerre du Comité de salut public. Comme on lui refusait un commandement dans l'artillerie, il pensa démissionner. Le 13 Vendémiaire il tira à balles réelles sur les insurgés et aida à les écraser. Il fallait faire respecter la République qui représentait le peu d'ordre qui existât encore. Puis il apprit à administrer et commander, à la place de général en second de l'armée intérieure, nommé par la Convention nationale. Carnot le nomma bientôt général en chef de l'armée d'Italie. Une semaine durant, il en étudia la cartographie. Avant de prendre son poste il épousa Rose Tascher de la Pagerie, veuve du général de Beauharnais, rebaptisée Joséphine, lui-même signa Bonaparte les registres, francisant son nom....

Troisième partie (132 pages), 7 chapitres.

La campagne d'Italie.

1796-1797.

Lodi, Arcole, Mombello, la paix de Campoformio...

Bonaparte occupe le terrain et ne tient pas compte des recommandations du Directoire, plus mesuré. Il concocte des permutations de propriétés, faisant fi des peuples, écrasant les révoltes, abolissant des siècles de fragiles équilibres... La Sérénissime se retrouve ainsi sous la botte autrichienne. Le Pape voit ses états amputés mais sauve sa couronne terrestre...

Rentré à Paris, Bonaparte revêt le costume civil, côtoie les peintres, les artistes, les savants qu'il semble estimer. Reçu à l'Institut, section des Arts mécaniques, le 25 décembre 1797, il déclare: "...les vraies conquêtes, les seules qui ne donnent aucun regret, sont celles que l'on fait sur l'ignorance" (relevé page 314).

Quatrième partie (121 pages), 5 chapitres.

L'expédition d'Egypte

1798-1799

Attardons-nous sur le chapitre 16, La route des Indes, qui introduit la période étudiée. Nous découvrons que c'est pour faire diversion, face aux anglais contre lesquels nous guerroyions que le Directoire accorda à Bonaparte cette escapade au royaume des Mamelouks. L'Orientalisme allait être à la mode; on s'était entiché de l'Empire Ottoman, non sans arrières pensées d'enrichissement possible, voire d'agrandissement territorial si on était bien placé pour recueillir le fruit mûr quand il ne manquerait pas de s'écraser... et on projetait, au demeurant, de défendre le Sultan de l'ogre russe qui, lui aussi, avait des visées expansionnistes. Pétris d'idées avant gardistes du Siècle des Lumières, décidés à libérer des peuples du joug qui les opprimait, Talleyrand et Bonaparte unissent leurs efforts pour plier les Directeurs à leurs vues. Car le Directoire tenait à son débarquement chez nos amis anglais. Or la Marine française, ce qu'il en restait, était en piteux état. Plus de cadres, partis à l'étranger ou éliminés, plus de marins disciplinés, des navires mal entretenus, ceux qui se risquèrent à naviguer en leur compagnie en revinrent fort marris... Bref les voilà prêts à couper la Route des Indes, à appauvrir la perfide Albion, à lui faire mordre poussière. Hélas, les ambassadeurs consultés avaient un peu forcé le trait sur l'empressement des peuples à accueillir leur libérateur.

Le chapitre 17, La conquête du Nil, est passionnant. Une véritable aventure avec son lot de mauvaises surprises, de drames, de descriptions exotiques, éblouissantes. Aboukir, la flotte anéantie après un jeu de cache-cache avec l'amiral Nelson; les torts partagés; l'énigme de l'attitude de Bonaparte qui détruira les archives quelques années après. Que craignait-il qu'on découvrît?... Là il attend les charges des Mamelouks en appliquant une méthode russe, qui a fait ses preuves, le carré défensif.

Dans le chapitre 18, Gouverner l'Egypte, nous voyons Bonaparte parfaire l'apprentissage débuté en Italie. Il dote le pays d'institutions, se désole de la non réactivité des administrés et ne tient pas compte de leur dépendance vis à vis des crues du Nil. Il réunit les autorités religieuses, les berce de promesses comme celle d'embrasser l'Islam. Il travaille beaucoup, considèrera cette parenthèse comme celle des jours heureux tandis que ses troupes et ses proches s'ennuient et pensent à déserter. Episode sanglant, la révolte du Caire.

Avec le chapitre 19, Jaffa, on est plongé dans l'horreur: femmes, vieillards, enfants sont systématiquement éliminés par la troupe ivre de sang, de débauche, de bestialité. Bonaparte ordonne le massacre de 3000 prisonniers de guerre; il n'a pas de vivres pour les nourrir, il craint la trahison s'il les relâche sur parole. Plus tard il enjolivera ses Mémoires...

Le souvenir de ce qu'il était capable de faire aidera à son ascension et sa prise de pouvoir. Le tribunal de la Haye demanderait encore de longues années entachées de massacres impunis avant de pouvoir officier... Le manque de communications rapides d'alors est frappant à une époque où on partage les événements planétaires en direct...

Au chapitre 20, Le retour d'Orient, on se dit que trop c'est trop, même s'il y a eu l'échec d'Acre... Celui "qui ne vivait que pour remplir de son nom les pages de l'histoire" (relevé page 425) ne recule devant aucun sacrifice. Hécatombe chez les officiers et les hommes de troupe, due à la peste comme à l'entêtement dans ses erreurs de Bonaparte, il se gardera bien de révéler le nombre des morts. Retraite après Acre, les malades seront empoisonnés pour leur éviter les supplices des Ottomans... Bref c'est 12% ou 20% d'hommes portés manquants selon le mode de calcul... Je ne saurais passer sous silence la noyade de quelques 400 prostituées, raflées, assommées, enfermées dans des sacs; "La situation, disait-il, l'exigeait". Enfin, il quitte l'Egypte, revient auréolé de sa victoire sur les Ottomans à Aboukir, dix à douze mille morts turcs, le 25 Juillet 1799...

Cinquième partie (49 pages), 2 chapitres.

Le passage du Rubicon

1799

Chapitre 21, La conjuration, 23 pages.

Voilà Bonaparte sur le sol de France, ayant laissé derrière lui son armée, sans en avoir reçu l'ordre, donc déserteur. Les Directeurs pensent bien un moment l'inquiéter mais y renoncent. Le renouvellement du tiers du Corps législatif leur fait faire du souci. Et s'il ne répondait pas à leurs attentes? Ils pourraient perpétrer un troisième coup d'état; en trois ans cela ferait beaucoup... Bonaparte, après avoir tenté de renvoyer Joséphine, lui redonne un sursis, préférant son appui pour recevoir beaucoup et préparer son ascension. Il consulte Barras, Sieyès, et Jourdan, homme intègre, trop à gauche. Bonaparte ne veut pas pactiser avec les Jacobins, il veut donner à son coup d'état toutes les apparences de la légalité. Il éloigne donc les Cinq-Cents à Saint-Cloud, où il les fait garder par l'armée, sous prétexte de les protéger... mais d'empêcher la réunion avec le Conseil des Anciens en réalité.

Chapitre 22, Brumaire, 21 pages.

Tout est en place pour perpétrer le coup et le réussir: des alliances, des promesses, des assurances... Sauf qu'au dernier moment les tièdes deviennent transparents, les discrets se font combattifs et Bonaparte se trouve mêlé à une échauffourée en forçant la porte des Cinq-Cents. Lucien, leur Président, le tire d'un mauvais pas car secoué par l'attaque imprévue il harangue les foules comme il le faisait en Egypte, ce qui à Saint-Cloud, pouvait le faire passer pour un aimable plaisantin s'il n'y avait eu les précédentes révolutions et la cohorte de malheurs qu'elles traînaient à leurs basques. Après moult péripéties il en fut fait de la République thermidorienne, on mit quelques heures à habiller le coup d'état en décision démocratique. Pour ce faire il fallut partir récupérer une trentaine de députés, qui furent déclarés deux-cents. Ils remplacèrent les Directeurs, démissionnaires et démissionnés par trois Consuls: Sieyès, Ducos et Bonaparte. Napoléon, pas Lucien. Son aîné lui en voulut beaucoup de n'avoir pas perdu son sang-froid quand lui-même perdait pied. Quant à Bernadotte, on tremble rétrospectivement pour lui, heureusement que marié à la belle-soeur de Joseph, celui-ci lui était très attaché...

Sixième partie (190 pages)

Un roi pour la Révolution

1799-1802

Chapitre 23, Premier consul, 19 pages.

Voilà de vieilles connaissances remises au goût du jour: Talleyrand, pour la diplomatie et Fouché pour la police. Pourtant Sieyès craint le Jacobin, le terroriste... Talleyrand, quant à lui, prépare le retour des Bourbons et pense "que Bonaparte n'était utile que le temps de convertir les Bourbons aux idées libérales et modérées" (relevé page 502).

"Aussi la politique attirait-elle Bonaparte du côté de Fouché, tandis que ses inclinations le poussaient vers Talleyrand. Fouché incarnait une époque que Bonaparte n'aimait guère, mais à laquelle il devait tout, tandis que Talleyrand, transfuge de l'ancienne France, représentait à ses yeux un monde dont il regrettait la disparition, mais qui ne pouvait revenir sans le priver de ses gains et, pis, de ce qu'il pouvait gagner encore." (relevé page 503).

Cette fois pas de sang versé, une liste de déportés publiée, qui fit long feu tant l'émoi suscité fut grand après que l'on ait promis d'oublier les rancoeurs. Le souci le plus important résida dans la rédaction d'une nouvelle constitution...

Chapitre 24, Les premiers pas, 12 pages.

Voilà Bonaparte premier consul, Cambacérès et Lebrun exerçant les fonctions de deuxième et troisième. Lebrun, échappé par miracle à l'échafaud, sous la Terreur, avait rêvé d'une constitution à l'anglaise. Cambacérès, tout couvert de rubans et dentelles, correspondant du prétendant en exil, avait lui aussi survécu en ces temps troublés... "Il avait dès 1793-1794, puis en 1796, rédigé les premières moutures du Code civil."(relevé page 516)

L'arrêt du 27 décembre amnistie les anciens Constituants, de La Fayette à La Rochefoucauld-Liancourt, et Carnot, Boissy d'Anglas... Barère... Plus de fêtes nationales hormis le 14 Juillet et le 1er Vendémiaire, quand fut fondée la République. Soixante des soixante-treize journaux paraissant à Paris furent supprimés...

Encore une fois Lucien Bonaparte fit preuve de talent: seulement 28% des électeurs avaient voté pour la nouvelle constitution. Du Ministère de l'Intérieur où son frère l'avait placé pour garder la main sur lui, tant il se méfiait du bon orateur qu'il était, Lucien améliora ce score médiocre. Et un bloc de voix unanimes venant de l'armée et un autre issu des départements, le tout sorti d'un chapeau de magicien, il put annoncer plus de la moitié des suffrages favorables à la nouvelle constitution. Résultat triomphal, mais faux. Bonaparte part s'installer aux Tuileries, qui ont plus de grandeur à ses yeux que le Luxembourg, même si elles sont quasiment en ruines après le passage de la Révolution.

Chapitre 25, Des Tuileries à Marengo, 32 pages.

D'aucuns pensent que la politique de Bonaparte, au début du Consulat, était capable de créer un nouvel ordre international, en simplifiant la carte de l'Europe. Il est plus probable qu'elle ait porté en elle le germe de guerres sans fin...

Après dix ans de chambardements, de perpétuel mouvement, le Consulat ramena le calme dans la gestion des affaires de la France. Finies les assemblées qui font et défont tout, le gouvernement par le peuple est mis en sommeil. Si vers 1783, l'Angleterre qui venait de perdre ses colonies d'Amérique était au même point que la France, avec une crise financière énorme, elle avait su, à cette époque, s'en relever alors que la France plongée dans les révolutions et les guerres s'appauvrissait. Un recouvrement des impôts, plus juste et plus efficace se devait de voir le jour...En Vendée, on se battait encore, sporadiquement, on voulait croire au rétablissement de l'Ancien Régime. Bonaparte rencontra des chefs, promit l'exemption de la conscription dans les départements de l'Ouest, la remise des arriérés d'impôts, la radiation de la liste des émigrés pour les chefs royalistes, le rétablissement du culte religieux pour ceux qui le souhaitaient... Il fallut se soumettre. Frotté, chef chouan qui refusa de rendre les armes fut fusillé en vertu des lois de la guerre. La guerre civile, chapitre clos, Bonaparte s'activa sur les frontières. Il prétendit amasser des troupes au nord-est, fit mine d'aller les passer en revue et descendit en Italie reprendre la terre que les généraux avaient abandonnée. Il renouvela l'exploit d'Hannibal, à dos de mulet et fondit sur les troupes ennemies qui ne s'y attendaient pas. Le mulet ne fut pas de la fête. La réaction des Autrichiens aida le général à remporter la bataille. Il faut aussi une part de chance. La défaite avait été très proche, il en était conscient en privé. Kellermann grâce à qui ils étaient victorieux fut dévalué, pas de concurrence acceptée pour recevoir les lauriers.

Chapitre 26, Les travaux et les jours, 28 pages.

Le Premier Consul de retour aux affaires est bien informé: il dispose de cinq polices différentes, et lit les rapports de Cambacérès et Lebrun. On l'avait dit mort à la guerre et son remplacement avait été envisagé...

Après un intermède avec Giuseppina à Marengo, il reprit la vie commune avec Joséphine, plus prudente. Vie bourgeoise, théâtre, opéra dont il raffole. Il sait s'entourer de serviteurs et de collaborateurs dévoués, signant toutefois chaque document refusant de leur laisser sa griffe... Il use ses secrétaires qui doivent traduire son discours pas toujours très clair, il confond beaucoup de mots ou ne les utilise pas à bon escient. Bref petit à petit il met en place son règne sans partage et grâce à son entourage des lois qui régissent le pays.

Chapitre 27, Le tournant de 1801, 28 pages.

Bonaparte a laissé Kléber et son armée sur le sol d'Egypte. Il décide de donner corps à sa promesse de leur envoyer du secours et de les rapatrier. Les anglais font le blocus des ports français, Kléber négocie avec les Ottomans pour ne pas faire anéantir ses hommes ce qui déplaît à Bonaparte quand il l'apprend. Entre temps les anglais poussent les Ottomans à rompre le traité et... Kléber sort vainqueur de l'affrontement. Bonaparte craint que les soldats rapatriés d'Egypte racontent sa conduite et nuisent à son ascension; il pense les cantonner dans des îles. D'autre part il s'occupe à étoffer les colonies françaises aux Amériques pour contrer l'anglais. Il tolère l'abolition de l'esclavage, pas comme humaniste mais en pragmatique: les Noirs seront reconnaissants à la France et feront barrière contre les anglais. (Toussaint Louverture oblige ses compatriotes à travailler et à rester attachés à la même habitation, hors le salaire cela s'apparente à l'esclavage)... La famille Bonaparte commence à réaliser qu'en cas de disparition du Premier Consul, elle perdra tous ses acquis, faute d'héritier. On se met d'accord sur la personne de Louis, frère cadet. (Il épousera Hortense Beauharnais à quelques temps de là)... C'est aux Invalides qu'il fut rendu hommage au Maréchal Turenne dont les restes avaient été profanés par les révolutionnaires: expulsés de Saint-Denis, déposés au Jardin des plantes, puis au Musée des Monuments français; Bonaparte mettait en pratique se faisant la réconciliation et la restauration des valeurs qui transcendent les époques... La guerre contre l'Autriche prit fin grâce aux succès de Moreau. Des traités furent signés, Bonaparte s'allia avec Paul 1er de Russie qui haïssait la Révolution française mais admirait le Premier Consul... Un complot aboutit, qui permit à Bonaparte de faire tuer des opposants en représailles et d'en faire exiler d'autres. Il obtint un décret afin de partager la responsabilité de cette justice expéditive. Il s'acheminait peu à peu vers le Consulat à vie et l'Empire.

Chapitre 28 La paix avec l'Eglise, 28 pages.

Printemps 1800: Chateaubriand qui rentre en France après un exil en Angleterre est effondré par ce qu'il découvre: des ruines ou à peu de choses près. Les pillages, les incendies, les démolitions, les abandons du fait des autorités révolutionnaires ou des bandes de pillards qui couraient les grands chemins ont jeté la France dans l'abîme. Déjà du temps des rois il y avait un décalage entre les campagnes françaises et anglaises, mais là c'est d'un gouffre qu'il s'agit d'extraire le pays. Bonaparte compte sur sa gestion, sa reprise en mains des institutions, le retour au calme pour faire repartir l'économie. Il constate que l'industrie textile qui fournissait les exportations est ruinée elle aussi... Le retour à la croissance ne s'amorcera qu'en 1802... Le chimiste Chaptal préconise une politique d'indépendance industrielle en important par exemple les matières premières qui faisaient défaut mais en les transformant en France... Robespierre, dès 1794, en pleine Terreur avait mis fin à la déchristianisation en instaurant le culte de l'Etre suprême. Cette religion civile était la promesse d'une restauration religieuse. La nouvelle église, dite Constitutionnelle n'avait que peu de fidèles. On avait aussi institué le culte de la Raison, l'église des théophilanthropes, les fêtes dédiées à la déesse Raison en 1793. Bonaparte ne se tint pas éloigné du problème religieux, malgré les conseils qu'on lui prodiguait. Il mit en place des négociations avec le nouveau Pape, Pie VII. Elles furent longues. Le ministre des Affaires étrangères, Talleyrand, écrivait des contre-projets car il tenait beaucoup à être absous, lui, l'évêque d'Autun qui vivait en concubinage notoire. Le Concordat fut finalement signé le 15 août 1801, daté du 15 juillet, proclamé plus tard. Pour les révolutionnaires ce fut une douche froide. Pour Louis XVIII aussi qui se voyait abandonné du Pape. Bonaparte avait compris qu'en détachant la religion de la royauté il faisait un pied de nez aux monarchies européennes qui l'avaient combattu et retirait au potentiel roi l'aura de son onction divine.

Chapitre 29, La plus haute marche, 34 pages.

Rédaction du Code civil dont les travaux préparatoires furent confiés à Portalis, ancien avocat au Parlement d'Aix. C'était un modéré qui, bien qu'imprégné des coutumes anciennes et n'appréciant pas les excès de la Révolution, avait lu Kant et découvert l'école des Lumières qu'il appréciait. "...religieux sans fanatisme et philosophe sans intransigeance... il [ne) se prêtait pas facilement aux compromis , moins encore aux compromissions." (relevé page 651). Bonaparte présida cinquante -sept séances sur cent neuf qui furent consacrées à cette rédaction; pour les autres ce fut Cambacérès. C'est lui qui a initié Bonaparte au droit civil. Les débats portèrent entre autres sur l'adoption, le divorce... Mais il fallait faire adopter les lois par les assemblées. Présenté titre par titre au Tribunat il fut rejeté, pour partie. Bonaparte profita du renouvellement partiel du Sénat pour imposer des changements en adéquation avec ses idées. Il fit le voyage à Lyon se fit couronner roi... d'Italie! De retour à Paris il mit la dernière main au traité de paix avec l'Angleterre, qui examinait prudemment ses faits et gestes...On se remit à célébrer avec faste les cérémonies catholiques, que les officiers de l'armée perturbèrent pour bien montrer que ce n'étaient pas des manifestations républicaines. Le Premier consul leur en tint rigueur. Il avait rétabli un train de vie comparable à celui des rois aux Tuileries, les vêtements masculins, les audiences, les dîners, les soirées, tout rappelait l'Ancien Régime... Il fit alors le grand saut: se faire proclamer Consul à vie; ce fut fait le 4 août 1802, le 21 août il se rendait au Sénat, prêter serment.

Notes:

En fin de volume, 116 pages d'explications , rangées par chapitre, à lire en parallèle.

Cartes:

8 pages

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