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Éditions Gallimard , 1963, pour le texte
Éditions Gallimard, 1979, pour les illustrations
Éditions Gallimard, 1987, pour la présente édition
  Le loup (19 pages)

  Craint de l'homme depuis toujours, le loup incarne la peur du prédateur pour lui. Mais pas pour elle! Elle? Marinette, dernière née à la ferme. Non, ce n'est pas une agnelle, ni une poulette, mais une adorable fillette aux boucles blondes. Avec Delphine, sa grande soeur, elles ont promis à leurs parents de rester bien sagement enfermées, de n'ouvrir à quiconque, en leur absence.

  Delphine et Marinette jouent aux osselets. Elles se lamentent car elles ne sont que deux. Leur sont donc interdits: la ronde, la paume placée, le furet, la courotte malade, la mariée, la balle fondue... "Ah! Si on était trois...".  C'est alors que le loup se fit pressant derrière la fenêtre, il était transi, une patte le faisait souffrir, il demandait un peu de charité, le laisser se chauffer au pied du fourneau. Marinette lui aurait cédé sur le champ mais Delphine tempéra ses ardeurs. Elle qui adorait aller à l'école et en tirait de grands profits, n'avait oublié ni Le petit chaperon rouge, ni Le loup et l'agneau! Mais après qu'il eût confessé qu'il regrettait amèrement ces débordements, on fit entrer le loup et on ne le regretta pas. Il se montra un compagnon délicat, leur conta des tas d'histoires de la forêt et accepta d'apprendre à jouer. "Il chantait avec une assez belle voix de basse les couplets de Compère Guilleri ou de La Tour, prends garde." Jamais le loup n'avait tant ri! Après qu'il eût prêté son dos pour le jeu du cheval, il lui fallut quitter ses amies car on craignait la réaction des parents. Ils perçurent d'ailleurs une odeur de loup en pénétrant dans la cuisine . La chose était si invraisemblable qu'il l'oublièrent.

  La semaine suivante, après leur départ, le loup revint trouver ses amies. On lui apprit à jouer au loup. Caché sous la table, il se tordait les côtes de rire tandis qu'aux questions de la comptine il répondait plaisamment.

  Et que croyez-vous qu'il arrivât?

  A lire et relire, bonheur assuré, tant ça fleure bon l'encre sur les doigts, la quiétude rurale, l'enfance! Indémodable.

  Le cerf ( 24 pages)

  Ce conte rappelle Le chien et le loup de Monsieur de La Fontaine; rien ne vaut la liberté mais elle a un coût et c'est très cher payé: le prix du sang.

  Ici nous voyons entrer en scène le chat, futé, de bon conseil, autoritaire et grand coeur. Il aide les petites à cacher un cerf. Non sans mal; sans le chien Pataud qui vint à la rescousse ils n'y seraient pas parvenus. Pataud est un transfuge de la meute qui chasse le cerf. Mais n'allons pas trop vite en besogne: à cette époque-là, au début du conte, Pataud est tout juste dissident. Il est arrivé à la ferme avec la solide intention d'y débusquer le cerf, ce sont les larmes des petites qui l'ont fait craquer. Dès lors il va se mettre momentanément au service des fillettes, les aidant à ourdir un complot. Il savait que sans leur flair les chiens de chasse seraient incapables de repérer leur proie...

  Le temps a passé, le cerf s'est laissé convaincre qu'il valait mieux vivre sous le joug que pas du tout. Il va faire ami-ami avec le boeuf (bien que son apparence physique ait d'abord fait mourir de rire le dit boeuf). Il a exigé des parents un jour de congé, le dimanche...

  Hélas, les parents ne sont pas des poètes et bien que le travail du cerf leur ait fait retarder l'achat d'un autre boeuf, ils perdent patience et le bastonnent. C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Le cerf retourne à sa chère forêt, pleine de dangers.

  Pataud, chien de meute, quittera définitivement son service quand le cerf, mourant, lui demandera de porter une petite marguerite à Delphine et Marinette, en remerciement de leur affection.

  Voici Pataud transfuge, acceptant le métier de chien de garde, moins prisé, dévalorisé, pour rester auprès des petites et cultiver la fleur du souvenir. Quelle est la morale de ce conte? Nul ne peut échapper à son destin est trop pessimiste; disons alors que le fait même de vivre est une prise de risques et qu'il faut toujours peser le pour et le contre avant de prendre une décision qui engendrera des changements?

  Beau et triste.  

  L'éléphant ( 21 pages)

   Il pleuvait tant en ce dimanche, que les parents ayant revêtu leurs beaux habits décidèrent de ne pas emmener les petites chez l'oncle Alfred. Elles seraient mieux au chaud. Elles promirent, naturellement, de ne faire rentrer quiconque dans la cuisine.

  Bientôt, elles s'ennuyèrent et décidèrent de jouer à l'Arche de Noé, si les animaux acceptaient. Ils virent là une occasion attrayante de passer l'après-midi et s'entassèrent dans la cuisine. Naturellement, les petites ne prirent qu'un exemplaire de chaque espèce, car la place manquait. Le boeuf, le cheval, le mouton, le cochon, la vache et la volaille se serrèrent et Delphine s'adjugea le rôle du pilote, elle devait éviter les écueils tandis que Marinette envoyait ou pas la vapeur...

  Mais une poulette blanche regrettait de ne pas avoir été choisie. Delphine lui mit alors un marché en main: elle participerait au jeu à condition de tenir un rôle d'éléphant. Marché conclu: la poulette observa des images dans un livre et se persuada tellement d'être un éléphant que toute sa physionomie se transforma et qu'elle devint éléphant. Le pauvre cochon eut la peur de sa vie, lui, qui, déjà pleurait famine, d'autant plus que si l'Arche venait à s'échouer il craignait d'être dévoré par ses comparses.

  Une fois qu'on eut affronté le déluge, un an durant, il fallut évacuer tous les pensionnaires, car les parents allaient revenir de leur sortie dominicale. Problème: l'éléphant qui ne passait pas les portes. On l'enferma dans la chambre et on s'employa, au retour des parents à les empêcher d'en franchir le seuil. Les bruits des pas de l'éléphant qui secouaient la maison étaient inexplicables et, malgré la complicité du chat, il fallut se résoudre à aller voir dans la chambre...

  Comment, me direz-vous, une poulette qui se transforme en éléphant, ça vous étonne? Et les animaux qui parlent, qui jouent alors? Oui. C'est très commun, dans les contes. Tandis que la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le boeuf, on sait ce qu'il en advint! 

  Le canard et la panthère. (21 pages)

  Qui, enfant, n'a jamais rêvé, si ce n'est tenté, de prendre le pouvoir sur ses géniteurs, d'inverser les rôles ou du moins d'adoucir la sévérité des parents?

  Delphine et Marinette sont en butte aux décisions parentales. Ne veulent-ils pas se débarrasser du vieux cheval qui les a servis sa vie durant? Sa maigreur leur fait remettre la sentence. Le canard quant à lui est suffisamment dodu pour qu'ils veuillent le passer à la casserole. Marinette et Delphine lui enjoignent de prendre les airs pas plus tard que demain matin pour échapper à son triste sort. Il est un peu réticent, ses connaissances en géographie n'étant pas bien étayées mais il part faire un tour du monde.

  Trois mois plus tard il s'en revient, accompagné d'une panthère! Cet été-là les parents sont obligés de lâcher du lest et même ils réapprennent à jouer; ils sont bientôt les plus acharnés. Chaque soir il faut que le sage canard les gourmandent pour qu'ils acceptent d'aller dormir... Quand on ne joue pas à la veillée, le canard fait profiter ses amis de ses découvertes planétaires, allant jusqu'à comparer les bienfaits de tel ou tel régime politique... Il n'y a guère que le cochon pour détester le sauvage félin( qui a promis de ne se nourrir que de nuisibles comme son cousin, le chat).

  Puis un matin le cochon disparaît, il est vrai qu'il a vraiment un sale caractère, qu'il ne manque pas aux autres mais dès lors  un malaise plane sur la bonne entente à la ferme...

  Le mauvais jars (20 pages)

  Les petites jouent à la paume, un jars arrive, leur conteste le droit d'utiliser son pré, les pince cruellement toutes les deux et pour finir leur confisque la balle! Un âne qui assiste de loin à l'algarade leur crie comment venir à bout de ce volatile belliqueux, elles sont si effrayées qu'elles fuient sans rien tenter.

  La mère oie si douce est bien à plaindre, ainsi que les oisons. Leur père leur enjoint de jouer à la balle et se lance dans une démonstration. Quand il tente triple virette de curieux signes d'étourdissement le saisissent et il perd la face... Les petites rentrent sans leur jouet, heureusement les parents sont préoccupés par la précocité de l'hiver, ils ne remarquent rien.

  L'âne si doux et si décrié pour sa prétendue bêtise que le mauvais jars met en avant va jouer un bon tour à ce prétentieux et permettre à Delphine et Marinette de retrouver balle et tranquillité d'esprit.

  Mignonne fabulette sur l'intolérance, l'étroitesse d'esprit, le véhicule des a priori, ces adages que l'on se transmet de génération en génération et qui n'ont pas de fondement.

  L'âne et le cheval (20 pages)

  Et revoilà les rêves les plus fous de Delphine et Marinette : vivre dans la peau d'un de leurs animaux préférés. Delphine a un penchant pour l'âne si doux, Marinette serait cheval. Elles échangent leurs souhaits avant de s'endormir...

  Grand émoi au réveil: plus question d'entrer dans sa jupette, ni de partager les repas des parents quand on est quadrupède. D'abord fort émus de la disparition des fillettes, les parents, opportunistes, ne manquent pas d'exploiter la situation en mettant sous le joug les deux équidés, qui reçoivent leur part de coups quand ils ne donnent pas satisfaction.

  Heureusement que le cauchemar s'achève et que les fillettes retrouvent avec bonheur les bancs de l'école...

  Dans ce conte les deux enfants observent une fois de plus la façon cavalière qu'ont leurs parents de traiter les animaux de ferme. Elles sont à l'âge où elles n'ont pas le souci de la rentabilité, seule compte l'amitié partagée avec les bestioles qui les entourent.

Le mouton (25 pages)

  L'oncle Alfred a offert un agneau aux petites qui l'ont élevé au biberon. La bête partage leurs jeux et leurs ébats au grand dam des parents qui les préféreraient s'attelant à des tâches domestiques.

  Mais voici que passe sur la route un soldat caracolant sur son fier destrier. Hélas! Il est vite désarçonné par sa monture peu encline aux démonstrations de prestige. Grâce à l'intervention des parents le canasson a la vie sauve: il est échangé contre le mulet... le mulet contre l'âne... l'âne contre le mouton... Le soldat dépeint sous un mauvais jour, balourd, ivrogne, quitte la ferme juché sur le mouton. Les parents ont gagné au change, sauf que le cheval ne se laisse pas enfermer à l'écurie! Il aide les petites à pister le soldat et court prévenir l'oncle Alfred du méfait des parents.

  Lesquels parents tremblent. On suppose qu'ils craignent de se faire déshériter, qui sait?

  Enfin, tout ce beau monde est réuni dans la cour de ferme et tout est bien qui finit bien, sauf pour le soldat qui part à pieds à la guerre mais il semble que l'auteur de cette fabulette était quelque peu désenchanté sur les capacités de la Défense d'alors...

 Les cygnes (20 pages)

  Ici l'auteur exploite le même filon pour entrer dans le conte: les fillettes promettent aux parents de ne pas enfreindre une défense, mais bien entendu, à peine ont-ils disparu au coin de la ferme, qu'emportées par leur imagination elles s'envolent loin des interdits.

  Les voici préoccupées par le sort des orphelins, des animaux orphelins; et prêtes à se faire adopter elles aussi. Qui n'a pas rêvé, enfant, d'intégrer un autre foyer, où l'éducation semble plus laxiste, les parents plus jeunes, plus "dans le coup", plus sympathiques, moins préoccupés par le devenir des bambins plus copain-copains?

  Les voilà donc embarquées sur un radeau tiré par des cygnes, qui, faute de preneur sérieux pour l'adoption des fillettes, se décident à en faire leurs pupilles. Mais ils sont sévères, ils ne mangent pas comme elles, elles réalisent que ce n'est pas leur monde. Après bien des péripéties les voilà de retour à la ferme avant le retour des parents. Pour ce faire le vieux cygne va sacrifier ses dernières forces et s'éteindre au milieu d'un champ. Les parents qui ont assisté à son agonie, et entendu son chant d'adieu, en sont tous retournés, ils font preuve de sentiment pour clore ce recueil.

 

 

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